Né de spermatozoïde inconnu...
Auteur : Arthur Kermalvezen
Préface : Serge Tisseron
Date de saisie : 26/03/2008
Genre : Ethique
Editeur : Presses de la Renaissance, Paris, France
Prix : 18.00 € / 118.07 F
La présentation de l'éditeur
Arthur Kermalvezen est psycho-pédagogue et porte-parole de l'association PMA (Procréation médicalement anonyme), il mène depuis deux ans un combat pour que les personnes conçues par IAD en France puissent avoir accès à leurs origines génétiques.
Né de spermatozoïde inconnu... mais pas pour tout le monde...
«Je savais que j'étais le résultat d'une programmation savamment orchestrée, d'une expérience scientifique qui s'est peu souciée des conséquences sur nous, les enfants. Nous avons été des cobayes...»
Conçu par insémination artificielle avec donneur (IAD), Arthur, 24 ans aujourd'hui, n'a pas accès à la totalité de ses origines puisqu'il ne connaît pas son «géniteur». Ainsi le veut la loi qui impose l'anonymat aux donneurs de sperme.
Évoquant l'histoire douloureuse de ses parents lorsqu'ils découvrent l'infertilité de son père, l'auteur raconte comment il est constamment renvoyé à cette «étrangeté de soi-même», malgré l'amour de sa famille. Car comment bien vivre quand on détient un vrai-faux secret sur ses origines génétiques ?
Délibérément provocateur, l'auteur tire la sonnette d'alarme pour les couples concernés par l'assistance médicale à la procréation, s'interroge sur leurs motivations et sur celles des donneurs de sperme. Il s'insurge surtout contre l'institution médicale qui détient les données dont il a besoin pour se construire.
Un seul objectif à ce témoignage : obtenir, lors de la révision des lois de bioéthique en 2009, la levée de l'anonymat des donneurs. Afin que chacun ait le droit de savoir d'où il vient.
avec la collaboration de Blandine de Dinechin
Les premières lignes
Extrait de l'introduction :
Henri et Inès, les parents d'Arthur, sont des amis depuis près de trente ans. Il y a quelques mois, la mère d'Arthur m'annonce par un coup de téléphone que son fils va apporter son témoignage d'enfant conçu par insémination artificielle avec donneur. Après des articles dans la presse et des émissions à la radio, il passait à la télévision... Comme d'autres, j'appris ainsi une nouvelle que j'ignorais. Arthur, cet adulte de vingt-quatre ans que j'avais vu bébé dans les bras de sa mère, n'était donc pas le fils génétique de son père. Il avait été conçu par insémination artificielle avec donneur (LAD). Quel ne fut pas mon étonnement !
Toutes sortes de pensées se chevauchaient dans mon esprit. Je me suis rappelé que j'avais interviewé, il y a plus de vingt-cinq ans pour la même revue, la mère d'Arthur sur sa formation au conseil conjugal et familial et le professeur Jouannet, alors responsable du Cecos (Centre d'études et de conservation des oeufs et du sperme humains) au Kremlin-Bicêtre. L'endroit même où les parents d'Arthur étaient allés régulièrement chercher des paillettes. Cela, je ne le savais pas à l'époque. Etrangère du sort : je connaissais tous les protagonistes d'une histoire qu'Arthur avait choisi de mettre au grand jour. Sauf, bien entendu, le donneur. Des questions fortes, toujours d'actualité, étaient alors posées sur l'importance de la psychologie, sur les incidences pour les familles des nouvelles techniques médicales de procréation et sur le devenir des enfants à naître de la sorte.
Vingt-cinq ans plus tard, je recevais en entretien de conseil conjugal et familial des couples en instance de divorce avec un enfant en bas âge, conçu par insémination artificielle. Pour prendre une image, il se passait exactement la même chose qu'après l'acquisition d'une maison, une fois les travaux finis, quand un couple s'aperçoit qu'il y a une différence entre rêver de son agencement et vivre vraiment ensemble dedans. En écoutant ces couples en mal-être, j'avais acquis la conviction qu'ils n'avaient guère été accompagnés sur le plan psychologique. Leur demande de divorce était le résultat tangible d'une détresse profonde. L'assistance médicale à la procréation avait-elle quelque chose à voir avec cette détresse ? C'est une vraie question.
Le regard porté sur la fécondité et sur la stérilité varie suivant les époques, les cultures et les personnes. Tandis que certains ressentent avec une grande tristesse l'absence de progéniture, d'autres peuvent vivre avec détresse une grossesse, comme me l'avait exprimé un couple :
«Vous comprenez, nous sommes un couple stérile», m'avait dit la femme.
Devant mon regard interrogatif, elle m'expliqua que tous leurs amis étaient stériles. Comme j'avais sans doute l'air de comprendre encore moins, elle précisa :
«Nous sommes entourés de couples sans enfants et nous n'avions pas nous-mêmes de projet d'enfant. Pourtant je suis enceinte.»
